Ça fait un an que j’habite à Parent... Au début, Parent, ce n’était pas apparent...

Le 25 août 2007 cela fera un an que j’habite cette immense forêt boréale, ce petit coin, tout petit coin de pays, un village, une localité, un secteur, un territoire non organisé (TNO), une fusion et maintenant un district. Appelez ça comme vous voulez, Parent.

Pour une jeune femme citadine, en milieu rural tous les problèmes sont exaspérants : le transport, l'éloignement et surtout le regard de l'autre pèsent plus qu'en ville. En contrepartie, les montagnes, la forêt, les lacs, les rivières et de si beaux paysages font que c’est une opportunité voire même une veine de pouvoir y habiter. Beaucoup d’autres m’auront dit : « Tu vas vivre dans la misère, y a rien là-bas, y a juste le bois ! »

D’un autre côté ce que je trouve le plus difficile c’est l’isolement. Dans les milieux ruraux, il y a souvent beaucoup de réticences des gens "de la place" à fréquenter les « autres ». Ce sont plutôt les gens originaires des autres régions - des "importés, touristes, gringos" – qui se fréquentent entre eux. Les autres se contentent de réseaux tricotés serrés du coin. C’est bien dommage mais on ne peut malheureusement pas changer le monde. On peut juste essayer de l’améliorer.

Malgré tout, pour moi, vivre à Parent, c'est maintenant apparent. Parent c'est le lieu où je m'épanouis. Ceux qui me connaissent un peu le savent, je suis une irréductible citadine. Mais comme Astérix et son village, je me suis attachée à ses racines qui sont fondamentalement rurales. Et comme ce vaillant guerrier qui défend son territoire, je défends ma réalité, celle du monde rural, avec toute ma fougue et ma passion, contre vents et marées, en tentant d’améliorer mon sors, notre sors.

Oui bien sûr, j'aime encore la ville pour y passer un moment. Mais je ne pourrais plus y vivre et mon choix de vivre en milieu rural est l'expression d'une liberté, de ma liberté et de celle de centaines d'autres habitants d’ici qui, comme moi, ont choisi ce milieu pour s'épanouir.

À l'ère où le système tend à mettre tout le monde dans le même moule, la vie en ruralité semblait pour moi la solution. S'évader, se retrouver, se créer un monde à soi, à son échelle et à son image avec son identité propre. Je suis maintenant fière de mon mode de vie, même si parfois je sens le dénigrement de la part de certaines gens qui voudraient bien me voir revenir dans le rang et que je me joigne à nouveau au plus grand nombre qui habite la ville et y en a qui le font, faute de ressources.

Plus que jamais, en cette époque de mondialisation et de globalisation, il faut s’encourager, petite population que nous sommes, et continuer de nous occuper à revitaliser notre espace. Il faut reconnaître nos richesses et leurs apports. Il n'y a pas qu'une seule façon d'être et de faire, il n’y a pas que l’industrie de la forêt. C’est la diversité qui fait la force d'une région rurale. C’est le tourisme qui revitaliserait notre petit coin de pays.

Amenez-en des projets ! Parce que c'est en se stimulant tous ensemble qu'on retrouverait nos véritables racines et que la vie reprendrait un rythme mieux adapté à l'humain que nous sommes. Parce que la nature y est encore accessible, parce que je peux y respirer autre chose que le carburant des poids lourds, parce qu'en levant les yeux vers le ciel je peux voir les étoiles. Et je pourrais continuer longuement, et tous les gens qui ont choisi de vivre à Parent pourraient également ajouter toutes les raisons de leur choix.

Non, fermeture de la scierie et ruralité ne sont pas synonymes de pauvreté. Plus encore, ce n'est pas vrai que la prépondérance des grandes villes est un gage de succès, la taille non plus. Notre travail à tous est simplement de trouver cet équilibre afin que chacun puisse y trouver son compte en y vivant libre et heureux.

Ce n'est pas vrai que tout se mesure en termes de grosseur et de rendement. Tout n'est pas ni noir ou blanc, tout n’est pas forêt, au contraire tout est en nuances. Et il faut miser sur toutes ces différences pour se bâtir un monde qui nous convient. Il faut aller au delà du facteur économique et voir plus loin que les bilans positifs, les profits et l'argent. A mon avis, la richesse n'est pas seulement une question d'argent. Elle est aussi culturelle et sociale, elle est faite de plaisir et de petits bonheurs. Des ingrédients qu'on retrouve dans un environnement qui nous convient, des ingrédients que l’on pourrait trouver ici à Parent. Quand on y pense, c'est bien plus facile de se façonner un village à notre image que d'influencer l'avenir d'une grande ville.

Ici encore, nous avons un rôle à jouer dans cet équilibre. Nous pourrions aussi aller au delà d’un service de proximité, d’une caisse populaire, d’un bureau de poste d’une école, d’un dispensaire et d’une scierie. Nous pourrions devenir un lieu d'action, un lieu de tourisme, nous pourrions prendre l'habitude de nous fréquenter de temps à autres, pour nous jaser un peu, pour échanger, pour faire des plans pour l'avenir.

Ici il y a des gens inventifs et bourrés de talents. Ils réussissent là où bien d'autres ont échoué à se tirer d'affaires et à se débrouiller avec bien peu de choses. C'est là toute l'histoire de Parent. Et nous pourrions continuer à y contribuer. Notre rôle pourrait aussi être très actif. À nous de trouver comment. Je nous fais confiance, les Parentois sont avant tout des gens débrouillards et ingénieux. Partout ici, il y a des trucs inusités, inventés pour se faciliter la tâche ou pour se divertir.

Savez-vous ce qui pourrait arriver si on mettait à profits tous nos talents, conjugués aux nombreux programmes d’aide financière gouvernementaux afin de revitaliser notre village, de rénover nos maisons et d’embellir notre localité? On pourrait assister à la naissance de viviers d'innovation et de créativité et être encore plus fiers de notre « Parent ».

Et c'est tout ce qu’il faudrait pour réussir. Travailler tous ensemble et faire reconnaître notre droit de vivre autrement. La reconnaissance de notre capacité de prendre en charge notre développement et d'assumer nos responsabilités à un échelon territorial proche de nos préoccupations. Et cela passe par une véritable volonté d’affirmer notre désir de vivre en dehors des limites d'un monde où tout est organisé. Vivre à Parent, c'est assumer notre différence. Il faut oser innover et se créer un véritable lieu revitalisé pour notre communauté.

Vous avez un rôle à jouer. Si vous avez pris le temps de lire ce que j’avais à dire, vous êtes de ceux qui peuvent faire la différence dans votre collectivité. Osez : c'est quelque chose qui dépasse les bancs d'écoles. En plus d'ouvrir l'esprit, ça permet de rêver, de connaître des savoirs et d’apprendre des autres. Osez demander, osez faire autrement, osez changer votre regard et osez voir à plus long terme. C'est une façon de faire qui pourrait être gagnante.

Si vous avez envie d’en discuter, si vous avez des projets en tête, des idées, si vous avez envie d’innover dans notre petit coin de pays, n’hésitez pas, tout est possible. Moi en tout cas, je fonce! Je fonce encore et j’y crois à un nouveau « Parent » ! Le mérite n’appartient pas à celui qui commence, mais au suivant qui pourrait faire mieux…

Pour un avenir meilleur pour Parent, pour faire avancer les choses, pour arrêter le dénigrement des hauts dirigeants de notre agglomération et pour qu’ils arrêtent de nous nous mettre des bâtons dans les roues quand leurs citoyens veulent du meilleur et tente d’améliorer pour leur vie en ruralité, pour que ceux-ci se joignent à nous à nos idées et à nos initiatives et finalement pour qu’il nous aide à trouver une économie autre que les ressources forestières.

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