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Doute raisonnable entre exploitation des gaz de schiste et contamination des nappes phréatiques

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Energy Information Administration

À travers la planète, l’exploitation des gaz de schiste inquiète car c’est nouveau et mal connu. Est-ce polluant? On se doute bien que oui sans en avoir la preuve. Mais voilà qu’aux États-Unis on vient de documenter un cas de pollution qui semble pouvoir être lié à l’exploitation des gaz de schiste. C’est ce que nous apprend le journal La Presse en ce samedi. Dans le cas rapporté, il s’agit d’une contamination des nappes phréatiques.

La publication de ce cas de pollution a été publiée par l’Agence de protection de l’environnement des États-Unis (EPA). Ce cas est étayé par une synthèse de résultats qui démontrent que des produits utilisés dans l’extraction des gaz de schiste se retrouvent dans des puits d’eau potable dans l’état américain du Wyoming.

Les recherches de l’EPA se sont faites dans la région de Pavillion car les gens qui y demeurent s’y plaignent de divers maux qu’ils attribuent à la contamination de leur eau par l’extraction des gaz de schiste dans le secteur. Sur vingt-huit puits analysés, dix contenaient du méthane, le fameux gaz dans le schiste. Mais, ce n’était pas tout, et c’est là qu’on retrouve ce qui pourrait être la véritable signature de contamination car, en effet, le méthane dans l’eau peut s’y retrouver de façon naturelle surtout dans une région où il y a du gaz dans le schiste. On a en effet retrouvé dans neuf des puits du phosphate de tri (butoxyéthyle), une sorte d’huile jaunâtre qui sert à l’extraction du gaz. Ce n’est pas naturel du tout. La Presse a interrogé la CSST pour savoir quel était ce produit, et la réponse fut que c’était un irritant et un neurotoxique lorsque absorbé par la bouche ou la peau. On a également trouvé dans certains puits analysés des phénols, du naphtalène et des produits qu’on retrouve dans l’essence ou le diesel. Ça aussi c’est moins naturel.

L’entreprise la plus active dans l’exploitation des gaz de schiste dans cette région est EnCana, une entreprise canadienne qui, on pouvait s’en douter, n’a pas rappelé La Presse qui cherchait à l’interroger sur cette étude. C’est embêtant de commenter cette étude lorsqu’on fait de l’exploitation gazière. En effet, que dire? L’étude de l’EPA ne fait toutefois pas de lien cause à effet spécifiquement entre les activités de l’entreprise dans la région et les contaminations. D’autres entreprises sont présentes dans la région également. L’EPA doit publier un rapport plus complet à la fin du mois. «Il est évidemment prématuré pour quiconque de tirer des conclusions avant même que l'enquête soit terminée» affirme l’Association pétrolière et gazière du Québec (APGQ). «L'APGQ suit avec grand intérêt l'enquête actuellement menée par l'EPA sur le sujet, dit Stéphane Gosselin, directeur général de l'Association, au journal La Presse. Par ailleurs, je réitère que l'APGQ prône que le gouvernement du Québec adopte un encadrement et une règlementation efficace et adaptée de l'exploitation du gaz naturel pour assurer la protection de tous les Québécois et de leur environnement.»

L’extraction des gaz de schiste est un procédé relativement nouveau et il semble qu’il puisse avoir été mis en place sans qu’on connaisse toutes les conséquences possibles de sa mise en place même si l’industrie affirme le contraire. L’Histoire industrielle nous démontre qu’il vaut mieux être critique. Le procédé de fracturation consiste à injecter de l’eau, du sable et des produits chimiques à haute pression dans le gisement. Cela fait éclater la roche, le gaz se libère et c’est ce qu’on appelle la fracturation hydraulique. L’industrie du gaz aux États-Unis a affirmé à maintes occasions, dont un passage devant le Congrès, qu’aucun cas de contamination des nappes phréatiques ne peut être attribué à la fracturation hydrauliques. Même l’EPA, en début 2011, affirmait la même chose. La présente étude apporte tout un bémol à cette affirmation. Ce type de pollution, selon l’Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA), prend du temps, est insidieux, et c’est la raison pour laquelle un moratoire total est nécessaire, selon André Bélisle le président de l’AQLPA.

Avec l’étude de l’EPA, il faut être plus critique face aux propos rassurants de l’industrie gazière. L’EPA elle-même n’était pas très critique envers la fracturation hydraulique jusqu’à récemment, et c’est en train de changer car les cas de pollution se multiplient dans les régions d’exploitation de gaz de schiste. Un doute raisonnable s’installe donc dans le lien exploitation des gaz de schiste et contamination de nappes phréatiques à proximité.

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