La Vie rurale / Opinions / Un débat politique sur la religion doit avoir lieu.

Un débat politique sur la religion doit avoir lieu.

Saguenay-Lac-Saint-Jean

Le Québec n'en est pas à une contradiction près. Après Laval, ce sera au tour de Saguenay d'être pris avec le controversé dossier de la récitation de la prière avant la séance publique du conseil municipal. Christian Joncas, ancien président du Regroupement des citoyens de Saguenay s'est adressé à la Commission des droits de la personne pour demander que Saguenay abandonne la prière. Si le jugement est le même que pour Laval, le pieux maire Tremblay devra cesser la prière d'ouverture, à son grand mécontentement. Pour le moment, le jugement de Laval ne l'a pas convaincu d'y renoncer.

Le Tribunal des droits de la personne a ordonné vendredi à la municipalité de Laval de cesser toute prière avant la séance du conseil municipal après des débats judicaires qui durent depuis 2001 suite à une plainte déposée à la Commission des droits de la personne par le Mouvement laïque du Québec, par l'intermédiaire de Mme Danielle Payette, choquée qu'on lui impose ce rituel religieux. Méchante religion catholique, hors des institutions publique!

Pourquoi alors permet-on le port du kirpan et du voile dans nos écoles publiques? Ce sont des symboles religieux. L'instance décisionnelle et légale n'est pas la même pour chacune de ces décisions. Pour le kirpan, c'est la Cour suprême du Canada qui autorise un élève de religion sikhe à porter ce poignard symbolique. La Cour d'appel du Québec avait ordonné un jugement contraire deux ans auparavant.

Le Québec veut être laïc et c'est pour cela qu'il a rejeté la religion catholique et continue de le faire dans les institutions publiques. La prière d'ouverture de séance du conseil municipal en est une des dernières manifestations du lien qu'il y avait autrefois entre la politique et la religion.

Il faudrait pouvoir être conséquent avec cette décision et interdire, comme en France, tout symbole religieux à l'école, dans les institutions politiques et publiques ainsi que dans les lieux de travail. Le Québec est laïc et doit le proclamer haut et fort. La décision de la Cour suprême permet le kirpan, le voile ou tout autre symbole religieux à l'école. Par contre, dans le monde municipal, plus de prière même si la majorité du conseil est catholique. Charité bien ordonnée commence par soi-même, si on n'accommode pas la religion de la majorité, pourquoi accommoder celles de minorités? Cela créé une injustice. Dès que vous créé une injustice vous ouvrez la porte à des débordements, à de la confrontation. La religion étant la mère de tous les maux actuellement, il faut être conséquent et prudent. Deux choix s'offrent à nos législateurs et ceux qui appliquent la loi :

1- Permettre la prière en ouverture de séance du conseil, moment de silence pour les athées, et permettre le crucifix, le kirpan, le voile etc. à l'école.

ou

2- Interdire la prière en ouverture de séance du conseil et tout signe religieux dans les lieux d'instruction et de travail.

Nous en sommes rendus là. Une ou l'autre décision va provoquer de la contestation. Les opposants de l'une ou de l'autre vont crier au fascisme, au retour en arrière et au racisme. C'est dans l'ordre des choses en ces temps troublés où les religions prennent, pour le pire, le devant de la scène. La ferveur religieuse étant, par ses dogmes, ennemie de la logique, de la science et du respect de la différence.

Les religions séparent les cultures, la laïcité est ce qui rapproche les cultures et les unis. La laïcité prône une religion uniquement pratiquée dans le privé et les lieux de culte. C'est ce que veulent une majorité de Québécois. Une majorité qui n'est pas écoutée et qui a peur de s'affirmer de crainte d'être traitée de raciste.

Il faut qu'une décision juste et égale soit prise au sujet de la religion dans la sphère publique. Choisir l'entre deux, rejeter la prière catholique et permettre les signes religieux à l'école, signes surtout utilisés par les religions de nos minorités, va créer une situation injuste. Cette situation injuste aura été involontairement créée par les plaignants laïcs et athées.

Favoriser des religions au détriment d'une autre, c'est inacceptable. Les musulmans, chrétiens et les juifs montent aux barricades lorsqu'une injustice est commise à leur égard. Un deux poids, deux mesures comme dans ce dossier ne fait que créer de l'injustice. Que nos instances juridiques s'accordent, ça presse. Nos instances juridiques ont désormais la responsabilité de ne pas prendre de décisions à la légère. Celle d'accorder le port du kirpan est une décision prise à la légère dans une société qui prône implicitement la laïcité. Cette décision a ostracisé la communauté sikhe durant un temps. Ce qui devait leur apporter de la paix leur a apporté des soucis. Tout ça parce que la Cour suprême a erré et est déconnectée de la réalité.

Le débat doit se faire sur le plan politique puisque le juridique échoue lamentablement. Il sera douloureux, il y aura des cris et des grincements de dents mais il doit se faire. La population doit se prononcer à ce sujet et les élus doivent écouter la population. Ne rien faire va laisser la situation devenir chaotique, illogique et potentiellement conflictuelle. Et ça, personne ne le souhaite.

Commentaires