Circulaires d’épicerie, à la limite de la fausse représentation?
Opinion
Depuis quelques années, je remarque un phénomène de plus en plus irritant en tant que consommateur : la non-disponibilité de certains produits annoncés dans les circulaires d’épicerie. À chaque semaine, si j’ai le malheur de faire ma liste d’épicerie à l’aide des spéciaux annoncés sur la circulaire d’un de mes deux détaillants préférés, j’ai tout intérêt à avoir un plan B pour chacun des items en vedette. Fort heureusement, si j’ai envie d’aller perdre mon temps au comptoir des services, je peux demander des bons d’achats différés. Toutefois, de plus en plus, je remarque que les consommateurs qui, comme moi, demandent des bons différés, s’en font de plus en plus souvent refuser pour deux raisons :
- Vous n’avez qu’à repasser cette semaine. Si le produit n’est toujours pas en disponibilité, alors là, nous vous ferons un bon différé. Bien sûr, je vais repasser, prendre de mon temps et dépenser de l’essence pour prendre une chance d’avoir un poulet à 0,99$ la livre. Laissez tomber!
- Pour les légumes en vrac, certains détaillants ne font plus de bons différés car d’une semaine à l’autre, impossible de savoir si ce produit sera disponible. Vous avez bien lu, on m’a répondu ça dans mon supermarché cette semaine. Alors là, on est rendu à la limite de la fausse représentation. On annonce un produit qui au final n’est pas disponible durant la période annoncée et où on ne peut émettre de bon d’achat différé.
Bien souvent, la plupart des consommateurs vont passer outre ce problème d’inventaire chronique et s’en retourner chez eux un peu frustré de ne pas avoir eu six boîte de mouchoirs à 3,99$, ou leur poulet à 0,99$ la livre, le sac de pommes de terres de 10 livres à 1,99$ ou tout autre item en spécial. J’ai comme l’impression que certains supermarchés misent sur le fait que la clientèle est de plus en plus pressée pour passer outre et faire valoir leur droit au respect de la circulaire d’épicerie. Ce que je viens de dire frôle le procès d’intention, mais si on ne peut pas respecter ce qu’on annonce sur une circulaire, ne vaut-il pas mieux alors indiquer moins de produits, faire une circulaire moins volumineuse et se contenter d’annoncer que les produits qu’on est capable de livrer?
Un autre exemple navrant chez mes deux épiceries préférées : l’effondrement des items en spéciaux les soirs et la fin de semaine. Outre le fait que la majorité des consommateurs font leur épicerie en dehors de leurs heures de travail, c’est à ce moment là que les épiciers sont obligés, de par la loi, à avoir le moins de personnel sur le plancher, que ce soit aux caisses ou aux entrepôts. C’est à ces moments là que les items vedette sont en rupture de stock et que vous devrez vous rabattre sur votre plan B et même au plan C. Surtout les soirs de fin de semaine.
Le problème d’approvisionnement provient de fluctuations trop importantes sur l’offre et la demande des produits vedettes de la circulaire, l’espace dans l’entrepôt de votre détaillant et de la disponibilité totale du produit. Bien sûr, ce n’est pas simple d’avoir en inventaire durant toute une semaine pour tous les produits annoncés dans la circulaire, surtout ceux de la page 1 et 2, dans toutes les succursales d’une bannière. C’est même impossible étant donné que ce problème semble chronique. Alors pourquoi l’annoncer? Pourquoi attirer le client avec un prix plancher pour quelques items qui seront disponibles sporadiquement durant la période annoncée? Pour nous attirer et nous forcer à opter pour un plan B plus cher? Le poulet à 0,99$ la livre n’est pas disponible aujourd’hui? Revenez plus tard cette semaine, ou allez au comptoir de service pour un bon d’achat différé. Si vous êtes pressé et avez un horaire du temps chargé, comme la plupart des gens sur le marché du travail, prenez le plan B qui est un excellent poulet de grain à 4,99$ la livre. Ce poulet semble de très bonne qualité et son inventaire en épicerie est important car il n’est pas dans la circulaire, mais il est tout de même 4$ de plus la livre que le produit vedette. Règle générale, que va-t-il arriver le plus souvent? Le poulet, à 4,99$ la livre, sera finalement acheté histoire de respecter le choix des menus de la semaine.
J’aurai alors respecté mon choix de menu de la semaine. Mon épicier sera content aussi. Bref, tout le monde il est content, tout le monde il est gentil. Et bien moi j’ai ai marre. Pour mes fruits et légumes en vrac, ce sera dorénavant systématiquement le marché public de juin à fin octobre. Bon, c’est déjà pas mal ça depuis quelques années, mais tout de même. On y annonce pas de spéciaux, on y fait toujours du négoce à la pièce, mais au moins ce sont pour la plupart des produits locaux, bien souvent bio et il n’y a rien de trop beau pour être vrai finalement.
Les grands épiciers sont en train de se tirer dans le pied car de plus en plus souvent, je vois des clients qui sacrent devant un étal vide d’un produit vedette de la circulaire. Il faut cesser d’annoncer des produits en rupture d’inventaire ou livré au compte goutte. D’ailleurs, comment peut-on faire une circulaire unique pour une province ou un pays et être capable d’offrir durant 7 jours, sur l’ensemble des heures d’ouvertures, assez de poulet à 0,99$, de boites de mouchoirs en paquet de six à 3,99$ ou de sac de bébé bock choy de 454 g à 1,99$? Voilà pourquoi existe le bon d’achat différé, une solution qui ne semble pas utilisée trop souvent. À chaque fois que j’en demande un, j’ai l’air d’un Martien qui vient de débarquer sur terre.
L’autre solution serait de ne pas se fier sur les circulaires pour faire son épicerie. C’est une excellente idée non? La facture ne sera pas nécessairement plus importante et on risque d’être moins frustré au final. Il faudrait même abolir la circulaire. Un gaspillage de papier important puisque qu’on les retrouve toutes sur Internet. Tant qu’à faire de la quasi fausse représentation, aussi bien ne pas abattre nos forêts pour le faire.
Est-ce que toutes les bannières et leurs détaillants font la même chose? Je ne sais pas. Je connais surtout deux détaillants de deux bannières que je ne nommerai pas car je ne veux pas de poursuite. De plus, sous une même bannière, certains détaillants ont peut-être plus de facilité à respecter leur circulaire et ainsi à respecter davantage leur clientèle… J’éviterai donc la généralisation en me disant que, sans doute, je suis mal tombé sur deux détaillants de deux bannières différentes qui, de manière chronique, ne respectent pas leur clientèle en faisant de la fausse représentation sur leur circulaire.