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La Coalition pour la liberté en éducation reçoit un revers judiciaire prévisible

Opinion du citadin

La Coalition pour la liberté en éducation (CLE) exige que le cours d’éthique religieuse devienne optionnel. Pour faire valoir ce point de vue, deux parents de la coalition ont déposé une requête contre leur commission scolaire. Or, le juge Jean-Guy Dubois, de la Cour supérieure du Québec, à Drummondville dans le Centre-du-Québec, a rejeté la requête. Dur revers en cette rentrée scolaire. Les enfants des plaignants vont suivre un cours d’éthique religieuse…

Pour les plaignants, le cours d’éthique religieuse porte atteinte à leur liberté de conscience et de religion telle qu’elle est protégée par les chartres canadienne et québécoise des droits et libertés. Le juge Dubois ne voit pas la chose de cette manière, il écrit dans son jugement : le «tribunal ne voit pas comment le cours d'éthique et de culture religieuse brime la liberté de conscience et de religion des demandeurs pour les enfants, alors que l'on fait une présentation globale de diverses religions sans obliger les enfants à y adhérer». L’analyse est logique, objective et pleine de sens.

Du côté de la coalition on ne comprend pas la décision. Richard Décarie, porte-parole de la CLE affirme à Radio-Canada : «L'argumentaire du juge Dubois est basé sur une interprétation de la religion catholique alors que la demande des parents était simplement de faire reconnaître le droit fondamental de liberté de religion et de conscience pour permettre justement aux enfants qui ne désirent pas assister au cours de pouvoir le faire, comme cela a toujours été le cas dans l'enseignement public au Québec» La CLE envisage de porter le jugement en appel. Il y a de plus deux autres causes semblables devant les tribunaux dont une à Granby dont nous avions fait état sur ce site en décembre 2008 : http://www.la-vie-rurale.ca/Articles/Estrie/Sortez-toute-religion-des-ecoles

Dès qu’on parle de religion, les pratiquants exigent des cours propres à leurs spécificités. Tous se réclament du peuple élu, tous se réclament gardiens de la vérité et sous des apparences trompeuses d’ouverture restent bien campés sur leurs positions. Voilà pourquoi le cours d’éthique religieuse, qui devrait être purement et simplement banni des écoles, dérange à ce point. La seule façon d’unir laïque et pratiquants dans le système scolaire, c’est de bannir toute religion des écoles : société laïque oblige.

La religion est toujours omniprésentes dans les familles et les lieux de cultes, inutile de la maintenir dans les écoles. Il s’agit là d’un anachronisme hérité de notre passé catholique en matière d’institutions scolaires. Le cours d’éthique religieuse n’est qu’une façon de plus de parler de religion dans un endroit que j’estime inapproprié pour le faire.

Ceci étant dit, le juge Jean-Guy Dubois voit juste en estimant que le cours d’éthique religieuse ne brime en rien la liberté de conscience et de religion. Ce serait bien différent, selon moi, d’obliger tous les enfants à suivre le cours de catéchèse catholique, comme il y a 20-25 ans même si la majorité des étudiants n’étaient pas pratiquants. Ça, c’est brimer la liberté de conscience et de religion. Un cours qui fait un survol global des religions, même s’il est complètement inutile et ne fait qu’attiser la colère de la CLE et des pratiquants de tout acabit, ne brime en rien la liberté de conscience et de religion. Même en appel, la CLE va perdre. Leur argumentaire ne tient pas et l’avocat qui les représente aurait dû voir venir ce jugement. Ça me semble une évidence même si je ne suis pas féru de droit. Croyants et athées peuvent suivre ce cours inutile mais peut-être intéressant d’un point de vue sociologique et historique.

Il suffit d’ailleurs d’aller sur le site de la CLE, http://coalition-cle.org/lacle.php , pour se rendre compte que leur réflexion est biaisée.

Ceux-ci affirment être un regroupement de toutes dénominations ou sans confession en provenance de toutes les régions du Québec. Ceci dit, on ne fournit pas de chiffres à ce propos sur le site. Sans ces chiffres, j’ai plutôt l’impression que la coalition est formée de parents catholiques activistes qui sont fâchés qu’il n’y ait plus de cours de religion catholique dans les écoles. Ce n’est peut-être pas ça, mais c’est l’impression que ça me donne faute de statistiques. Et toutes les régions ressemblent plus à Drummondville et Montréal (voir page de contacts sur le site).

Autre affirmation biaisée de ces parents catholiques en provenance de toutes dénominations ou sans confessions et qu’on retrouve sur le site ci-haut mentionné : c’est l’État qui, désormais, décidera ce qui est moralement bien pour nos enfants. L’État peut donc obliger les enfants à suivre des cours qui vont à l’encontre des principes ou valeurs familiales. Les parents ont perdu le pouvoir de décider pour leur enfant, ils ne sont plus les premiers responsables de l’éducation de leurs enfants.

Tout est faux dans cette déclaration. En effet, le gouvernement a choisi de donner un cours qui survole l’ensemble des tendances religieuses en refusant de prendre parti pour une religion en particulier contrairement à un cours d’éducation religieuse. L’état ne décide pas de ce qui est bien pour l’enfant en matière de religion, elle ne fait que rapporter des données et informations sur toutes les religions, c’est aux parents de faire le reste. Ce cours justement, en quoi va-t-il à l’encontre des principes ou valeurs familiales? Les parents ont perdu le pouvoir de décider quoi pour leur enfant. Si votre enfant va à l’école, il doit suivre des cours de maths et de français, que vous le vouliez ou non. Même chose pour le cours d’éthique religieuse : il doit suivre ce foutu cours. C’était la même chose lorsque j’étais gamin et adolescent, je devais suivre le cours de catéchèse catholique même si je ne croyais pas à son contenu. Ce serait la même chose pour le cours d’éthique aujourd’hui, pour moi tout cela est de la foutaise, mais voilà, ça fait parti du programme scolaire et cela semble être accepté par la majorité la coalition n’étant pas représentative de l’ensemble des parents.

La coalition exige ceci : La modification de la loi 95 afin que soit redonnée aux parents la liberté de choisir pour leurs enfants un enseignement moral ou religieux à l’école, en accord avec à leurs croyances et leurs convictions.

Dans le Québec multiconfessionnel d’aujourd’hui, ce modèle n’est plus possible, il y a trop de religions différentes et même de courants au sein d’une même religion. La coalition n’est pas branchée sur la réalité du Québec d’aujourd’hui et demande à avoir droit de regard sur le contenu d’un corpus scolaire, ce qui serait inacceptable. Un groupe de pression ou un individu ne doit en rien influer sur un programme scolaire. Le cours d’éthique religieuse est un compromis qui tente, maladroitement, de plaire à tous. Au moins, le ministère de l’éducation essaie quelque chose.

La CLE aurait-elle entrepris la même action en justice si tout cours ayant trait à la religion avait été enlevé des écoles? Sans doute. À lire leur site, il me semble que la CLE veut un retour aux bons vieux cours de religion (pour eux) et de morale (pour les autres). Deux poids, deux mesures, pour croyant et athée, une foutaise tout comme le cours d’éthique religieuse avec en plus un retour en arrière. Non merci.

J’estime que le revers en justice de la coalition est mérité parce que mal argumenté et reposant, comme toute religion, sur des croyances et non des vérités.

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