Trop faible qualité de tests de cancer, mon grain d’inquiétude
Une autre brique du fleuron d’édifice national est tombée. C’est l’écho qui me vient de l'étude du pathologiste Louis Gaboury. Le génie québécois des tests de cancer n'est pas aussi blindé que nous le croyions ou aimerions croire. Défaillant à la fois en contrôle de qualité, et par manque de moyens matériels adéquats, et humains.
Aussi, la révélation intrigue par le fait qu’une étude aussi sensible ait été communiquée aux médias pour en faire un scoop, plutôt que d’alerter rigoureusement et immédiatement le gouvernement. En choisissant d’aller en exclusivité vers les médias, l’auteur a-t-il pensé un instant aux patientes? Non! On dirait un chasseur de primes. Un coupable est dans la mire, on avise les tireurs d'élite. Ça n’a pas de bon sens! Et que dire des médias?
Ce réflexe d’indexation d’un coupable, sans diagnostic et sans plan d’action, est symptomatique du syndrome d’autodéresponsabilisation, soit le refus et la peur d’assumer une défaillance, et la défaillance du sens de responsabilité. Il tient, je crois, au fait que nous sommes une société de moissonneurs-non-planteurs, aveuglés par l’abondance et habitués à tout voir fonctionner sans trop savoir d’où ça vient. « Tout fonctionne bien, et tout est sous contrôle », croyons-nous hélas religieusement. Depuis, nous perdons le sens d’éveil et d’excellence. Aussi, risquons-nous de sombrer dans le paralysant « rien ne va plus! » Pas étonnant que des monuments s’écroulent et nous surprennent, que nos débats soient stériles… Des ponts, des voiries s’affaissent, des élèves décrochent, des usines ferment, etc., pendant que médias et cadres s’accordent pour désigner le coupable: le gouvernement. Oui, les fonctionnaires et les élus ne sont pas infaillibles. Mais, dans une société décentralisée, la responsabilité des individus et des organisations est grande. Quand il y a des ressources essentielles à l’efficacité d’un service, nul ne peut s’accommoder d’en manquer.
Est également inquiétant le lien d’intérêt du commanditaire de l’étude. Il ne serait guère rassurant de lier l’étude à un laboratoire pharmaceutique qui vend des médicaments contre le cancer. Lorsque la qualité des tests est mise en cause, il devient alors impensable d’interroger l’effet du médicament. Ainsi le laboratoire sera à l’abri de toute poursuite dans l’éventualité d’un doute sur l’efficacité ou les effets indésirables de son produit.
C’est pour ces raisons qu’il aura été sage d’interroger la validité et l’éthique de l’étude, et d’accélérer la définition des axes d’actions. Un autre axe à ne pas oublier, c’est la responsabilisation des intervenants, pathologistes, médecins et médias de façon qu’on n’évite les gaspillages d’énergies et de ressources dans des verbiages sensationnels qui profitent à d’autres que les patients.