Le milieu agricole a un taux de suicide vertigineux
Opinion du citadin
La semaine de prévention du suicide au Québec vient de se terminer. Nous avons longtemps été les tristes champions mondiaux en termes de taux de suicide. De notables améliorations sont constatées ces dernières années notamment au niveau des adolescents et des homosexuels. Beaucoup de travail reste à faire, mais les données sont encourageantes. Tout le contraire de ce que connaît le milieu agricole où le taux de suicide est deux fois plus élevé chez les agriculteurs que dans la population en général. C’est ce que rapportait cette semaine le porte-parole de l’opposition officielle en matière d’agriculture M. Albert De Martin.
Ce dernier affirmait : «Selon les données disponibles, 1 agriculteur sur 2 serait en détresse psychologique et les agriculteurs québécois sont 2 fois plus susceptibles de passer à l'acte que le reste de la population en général. C'est très préoccupant!» Ça l’est en effet. Aucune profession n’approche un tel niveau. Les facteurs aggravants chez les agriculteurs sont les crises successives qui frappent l’industrie, les pertes financières qui suivent. Tout cela augmente de beaucoup le niveau des stress et de désespoir chez les agriculteurs. .«Le problème est majeur, il est même fatal dans trop de cas. Le gouvernement doit mettre en place des mécanismes de prévention du suicide sur les fermes ainsi que trouver des solutions afin de rentabiliser l'agriculture au Québec», a indiqué M. De Martin lui-même cultivateur.
Le porte-parole de l’ADQ a vu juste sur deux points. Briser l’isolement des cultivateurs, faire de la prévention et surtout rendre le secteur rentable. Pour y arriver, il faudra une loi musclée pour protéger les produits du Québec d’une compétition déloyale. On oblige nos cultivateurs à respecter des normes de plus en plus sévères en matière environnementale et de traçabilité. Cela fait grimper les coûts. Puis, de l’autre côté, on permet aux grossistes alimentaires d’acheter le même produit moins cher en provenance de province et pays où ces normes ne sont pas en vigueur. Les grossistes en alimentation achètent donc ailleurs plutôt qu’ici leurs viandes, légumes, fruits etc.
Il devrait être interdit aux grossistes en alimentation d’acheter des produits qui ne respectent pas les normes de productions d’ici. Sinon, c’est carrément de la compétition déloyale. Est-ce ça l’ALENA et la mondialisation des marchés? Si c’est le cas, nous sommes perdants sur toute la ligne, surtout en matière agricole.
C’est bien beau d’imposer des lois et restrictions auprès de ces bons et loyaux cultivateurs afin qu’ils respectent l’environnement et qu’on puisse retracer le moindre poussin, encore faut-il être équitable à leur égard. Ce qui n’est malheureusement pas le cas. Ces derniers ne sont pas mieux défendus par leur syndicat, l’UPA, que par leur gouvernement. Plutôt que de légiférer contre les produits issus de l’agriculture Frankenstein en provenance de partout sauf d’ici, on a rendu les cultivateurs dépendants de subventions, de montants compensatoires, d’assurance stabilisation etc. Dépendant de la charité de leurs concitoyens payeurs de taxes, du bon vouloir de leurs gouvernements, les cultivateurs vivent un stresse permanent. Et si les sommes tardent à arriver, il est parfois trop tard pour un pauvre bougre qui s’est pendu dans son étable.
La rentabilité de l’agriculture passe par une loi équitable envers nos producteurs. Oui au libre marché, en autant que les mêmes règles soient respectées par tous. Ce qui n’est pas le cas et qui fait en sorte qu’on ne sait pas ce que l’on mange lorsque ce n’est pas «made in Québec». D’ailleurs avez-vous remarqué que, chez votre épicier, il est de plus en plus difficile de trouver des produits québécois, même en été? Ça c’est une grave injustice et c’est la raison pour laquelle les marchés publics sont de plus en plus populaires auprès des citadins qui en ont assez de manger des poids manges tout de Chine alors qu’il en pousse plein au Québec.
Pour contrer le suicide chez nos cultivateurs, c’est d’abord à ça qu’il faudra s’attaquer.
En terminant, voici un bref survol des dernières catastrophes alimentaires. Notez quelles ne provenaient pas du Québec.
- Épinards américains contaminés au E.Coli : http://www.la-vie-rurale.ca/contenu/8528 et http://www.la-vie-rurale.ca/contenu/8580
- Vache folle : http://www.la-vie-rurale.ca/contenu/349
- Gluten de blé contaminé en Chine : http://www.la-vie-rurale.ca/contenu/11934
- Chili américain vendu au Wall Mart : http://www.la-vie-rurale.ca/contenu/13824
- Embargo sur la pomme de terre du Québec victime d’un prédateur naturel qui ne rend pas le produit dangereux pour la consommation : http://www.la-vie-rurale.ca/contenu/8104
Va falloir se conscientiser tous sur cette question capitale
S.Bilodeau
Lundi 03 Mars 2008 1:22:17 pm