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Enfin Rabaska

Opinion du citadin

Cette semaine le gouvernement Charest donnait son aval pour le projet de port méthanier Rabaska. Depuis 2004, ce projet est passé par toutes les étapes menant à son acceptation par le gouvernement provincial malgré une forte opposition. Le projet va aller de l’avant parce qu’il a également de nombreux appuis dans la population. Malgré une opposition bien organisée qui désire aller en justice pour contester cette décision, les travaux vont débuter en 2008.

Les opposants ont tout de même manifesté ce dimanche après-midi. Un millier de personnes ont répondu à l’appel d’environ une vingtaine de groupes environnementaux et ont manifesté devant l’Assemblée nationale. Radio-Canada rapporte que les organisateurs qualifient la manifestation de succès de foule. Je ne suis pas d’accord. Plus de 50 000 personnes avaient manifesté pour empêcher la fermeture d’une station de radio à Québec, ça c’est un succès de foule. 1000 personnes pour protester contre Rabaska, ce n’est pas un succès de foule, c’est un succès d’estime. Désolé de casser le party.

Les manifestants considèrent que Rabaska va avoir d’importantes répercussions négatives sur l’environnement en plus de nous empêcher d’atteindre nos cibles pour Kyoto. C’est à moitié vrai, il n’en dépend que de nous, Québécois, d’échanger notre vieux mazout pour le gaz naturel. Bien sûr, l’idéal serait de n’utiliser que de l’énergie renouvelable pour le chauffage et le transport, mais comme aucun pays dans le monde n’en est rendu là et que les Québécois ne veulent pas d’éoliennes dans leur cour, voilà où nous en sommes : étudier sérieusement l’option gaz naturel.

Elle n’arrive pas comme ça cette option. Elle est envisagée depuis longtemps et depuis trois ans elle suit un processus légal qui vient d’aboutir. Le BAPE, le ministère de l’Environnement et une quinzaine de ministères et organismes (fédéral inclus) se sont prononcés. Aucun avis défavorables au projet. Seul refus qui risquait de faire capoter Rabaska, la Commission de protection du territoire agricole (CPTAQ) qui, à deux reprises, a refusée de modifier le zonage des terres agricoles où le port doit être construit. Raison de ces refus : la preuve n’aurait pas été faite qu’il s’agissait du seul endroit possible où construire le terminal.

Cet argument, selon moi, ne tient pas. Le port aurait pu être construit n’importe où ailleurs le long du fleuve, c’est vrai. Cela aurait coûté plus cher ou cela aurait été plus dangereux. Tout le processus devant le BAPE concernait l’emplacement actuel. Le fait de changer d’emplacement aurait obligé Québec à refaire tout le processus du BAPE. Belle hypocrisie à nos frais, cela aurait tout simplement fait avorter le projet. Le gouvernement étant favorables à la construction de Rabaska, après tout le processus du BAPE, il a dessaisi la CPTAQ du dossier le 4 octobre 2007. Les promoteurs ont désormais le champ libre. Cela ne veut pas dire que le projet va se concrétiser, des contrats d’approvisionnement doivent être signés. Mais au moins, tout le processus légal d’acceptation du projet est franchi. Terminé la foire.

Rabaska est un projet de 840 millions qui va créer 5000 emplois durant la construction et 500 pour la maintenance. Rabaska c’est aussi une possibilité pour un environnement meilleur. Les travaux de construction pourraient débuter l’été prochain et le terminal serait en service en 2011. Les opposants étudient l’option des tribunaux pour empêcher Rabaska. Ils considèrent que le gouvernement Charest a violé ses propres lois en retirant du dossier la CPTAQ. Malheureusement pour eux, la province et le pays ne sont, Dieu merci, pas dirigés par les juges.

La manifestation de cet après-midi devant l’Assemblée nationale devait être une manifestation monstre qui devait possiblement faire reculer le gouvernement. Ce ne sera pas pour cette fois, avec seulement 1000 manifestants. Thomas Mulcair, ancien ministre de l’environnement sous Charest et nouveau député fédéral du NPD dans Outremont a affirmé cette semaine dans Le Soleil que le gouvernement provincial pourrait devoir reculer sur ce dossier comme il l’a fait pour Orford. Malgré tout le respect que j’ai pour cet homme politique avisé, j’espère qu’il a tort. En effet, si Rabaska ne passe pas, la preuve sera faite qu’au Québec, aucun projet d’envergure sur le plan industriel ou énergétique ne peut passer.

Juste pour ça Rabaska doit aller de l’avant. Si toutefois, entre 2011 et 2015 le Québec ne fait pas la transition du mazout au gaz naturel et augmente sa production de gaz à effet de serre, je serai le premier à parler de l’échec de ce projet. Je serai le premier à le dénoncer. Ceci dit, d’ici là, je crois qu’il faut donner la chance au coureur et que les arguments en faveur du projet sont bons. Il faut essayer, le statu quo du mazout n’est plus possible. Si nous échouons nous ne pourrons que nous en prendre à nous-mêmes, car c’est nous qui allons consommer ce gaz naturel en plus du mazout. C’est nous, collectivement, qui auront raté la transition vers un combustible plus propre. C’est ça le défi Rabaska et enfin, nous allons pouvoir le relever.

Commentaires

Rabaska

Dans son article du 28 octobre 2007 (La Vie Rurale), Ricardo Codina écrit et je cite: "Rabaska est un projet de 840 millions qui va créer 5000 emplois durant la construction et 500 pour la maintenance.". Voilà une affirmation plutôt discutable qu'on retrouvait déjà dimanche soir sur Canoe, sous la plume de Steve Deschênes.

Depuis l'annonce du projet, le nombre d'emplois créés durant la construction a varié entre 500 et plus de 5000, selon les auteurs. J'ai même vu deux chiffres différents dans un même document; il suffisait de tourner la page pour en avoir 250 de plus. Il s'agit là de projections que seule la réalisation du projet permettra peut-être de vérifier. A condition, bien sûr, qu'on nous dise la vérité, autant sur le nombre d'emplois créés que sur la proportion des emplois attribués à des travailleurs d'ici.

Quant aux "... 500 (emplois) pour la maintenance", j'imagine, parce que ce n'est pas clair, que vous parlez de la période pendant laquelle le complexe sera en opération. Depuis le début, le promoteur lui-même a toujours parlé de 70 emplois à plein temps pour cette phase du projet, soit sept fois moins que ce que vous annoncez.

Evidemment, une aussi grosse carotte réussira bien à convaincre quelques naïfs...

Et dire que les défenseurs de Rabaska accusent continuellement les opposants de dire n'impote quoi!

Mario Fortier
Beaumont

Naïf

Je veux bien passer pour naïf si cela vous chante. Il est vrai qu'il y a bien des spéculations sur le nombre réel d'emplois lié à Rabaska, j'en conviens. Ceci étant dit, si le projet Rabaska ne se fait pas, il y aura un chiffre indiscutable de 0 emploi et nous continuerons à brûler davantage de mazout.

nombre de travailleur

En passant un port méthanier de la grosseur projeté de rabaska permet a 35 ouvriers de travailler à temps plein. C'est le cas notamment d'un port méthanier situé dans les provinces maritimes. Laissons le bénéfice du doute aux promoteurs de rabaska. Mais peut-on comparer le salaire de 35 personnes à plus de pollution et à la déportation de près de 300 habitants de l'est de Lévis?

Le feu vert des incendiaires rouges.

Au son lugubre des tambours de la démagogie libérale provinciale, Rabaska/Québec est décrété. Après les orgiaques fiascos du Suroît et du Mont-Orford, voilà le méga fiasco de Rabaska, cette fosse de tous les fumures du mépris des capitalistes noceurs et commanditaires de certains usurpateurs du pouvoir et naufrageurs provinciaux dont l’irresponsabilité est à son zénith et dont la respectabilité est à son point mort. A la limite de l’arrogance et sans oublier que les adéquistes applaudissent cet abusif aplatissement, ce troisième affront des libéraux régionaux est une insulte à l’intelligence, une dégradation de la logique environnementale, une injure au gros bon sens, un outrage aux Lois et Commissions existantes, en matière de protection de l’environnement et des terres agricoles ainsi qu’une impudente et violente culbute infligée aux citoyens, en matière de Santé publique. Rien de moins qu'une tactique qui tient de la balistique fossoyeuse, cette méga porcherie gazière est une infamie qui déshonore la classe politique. Les braves contestataires du frisquet dimanche 28 octobre, ont accueilli l’abject et l’ignoble de l’aval des libéraux, secondé par les adéquistes, avec la répugnance et la révolte annonciatrices d’une grogne montante dont l’explosion est éminente. Que le «Triste Sir» John James Charest sache que Rabaska ira rejoindre Suroît et Orford et qu’il se souvienne qu’à la prochaine parade aux urnes, les Québécois, solidairement, se rappelleront du 24 octobre 2007, le bien triste jour de l’insolente défiance nationale incorrigible des libéraux provinciaux. Les prochaines élections se voudront un «blâme national» signifié au PLQ et à son chef, à l’égal du putsch citoyen 2003 dont le PQ ne s'est pas encore remis.

poète contestataire

Voilà un beau poème contestataire qui illustre fort à propos votre vision des choses. Rabaska = capitalisme. Donc, c'est très mauvais. Deux partis politiques qui représentent la majorité des Québécois sont pour, mais vous êtes convaincu que la majorité des Québécois est contre Rabaska. Êtes vous certain? 1000 personnes qui répondent à un appel populaire aussi massif, il me semble que si c'est représentatif du mouvement contestataire il est bien marginal ce mouvement. Ne trouvez-vous pas? Ceci étant dit, je trouve votre texte très bien tourné.

Rabaska

"Je veux bien passer pour naïf si cela vous chante", me dites-vous en réponse à mon premier message. Vous admettez même "qu'il y a bien des spéculations sur le nombre réel d'emplois liés à Rabaska". Vous auriez pu ajouter que le taux de conversion du mazout vers le gaz naturel fait aussi partie des spéculations.

Là où je trouve votre honnêteté intellectuelle plutôt particulière, c'est quand vous omettez de me répondre sur un fait bien connu depuis plus de trois ans et que vous le déformez grossièrement. Alors que le promoteur a affirmé depuis le début qu'il y aurait création de 70 emplois pendant la période d'exploitation, vous, vous en annoncez 500, soit sept fois plus. Une grosse carotte, me semble-t-il. Etes-vous donc prêt à contredire aussi exagérément le promoteur sous prétexte de défendre son projet? Vous me rappelez cet homme d'affaires de Québec qui a affirmé au BAPE que le plan de compensation offert aux résidents du secteur était "juste et équitable" et qui m'a avoué, quelques minutes plus tard, qu'il ne l'avait pas lu.

Pas naïf

Monsieur Fortier,
J'envisage Rabaska comme la possibilité de passer du mazout au gaz naturel pour l'est du canada et ainsi augmenter notre taux de conversion qui est, actuellement, très bas. Le gaz naturel est moins polluant et dommageable pour l'environnement. Très sérieusement, le nombre exact d'emplois créés par Rabaska ça ne m'intéresse pas. Je sais qu'il y en aura des emplois car un terminal méthanier ne peut rouler tout seul. Mais je ne sait pas combien. Vous pouvez bien vérifier tout ce qui se dit et contrevérifier pour savoir si c'est vrai ou pas, si le nombre d'emplois est exact ou pas, si, si, si, si. Avec autant de si on ne fera jamais rien pour l'environnement, on ne fera jamais rien pour combattre notre dépendance au mazout. Ne pas faire Rabaksa, c'est se condamner au mazout jusqu'à ce qu'on ait assez d'éoliennes. Ça peut être long ça, monsieur Fortier.