La Vie rurale / Articles / Culture / Lhasa De Sela et la pérennité de son oeuvre

Lhasa De Sela et la pérennité de son oeuvre

Opinion du citadin

Source image : http://lhasadesela.com/

Un psychodrame ébranle la toile depuis le décès tragique de la chanteuse Lhasa De Sela, emportée à 37 ans par le cancer du sein. J’aimais beaucoup l’oeuvre de cette chanteuse sans toutefois être un fan, ne possédant même pas un de ses trois albums studios. N’empêche, j’aimais bien et j’étais certain de la voir dans le paysage musical québécois durant les prochaines décennies. Mais voilà, la mort est une salope…

Puis, viens un certain Louis Lacroix, animateur au FM 93,3 de Québec, qui émet un propos maladroit sur la chanteuse : http://www.youtube.com/watch?v=yLo3QVNPPq0 Genre de propos qu’on n’est pas habitué d’entendre dans l’émission du retour de Gilles Parent. Louis Lacroix remplaçant Gilles durant ses vacances, il dérape avec un sujet sensible à peine 4 jours après le décès de la chanteuse. Patrick Lagacé, sur Cyberpresse, y est donc allé d’un article virulent à l’endroit du malheureux animateur gaffeur http://blogues.cyberpresse.ca/lagace/?p=70723998 .

On parle ici d’une gaffe, d’une faute de jugement dans le traitement de l’opinion émise et non de radio-poubelle. L’erreur, selon moi, est humaine. Mais là, trop tard, le bal est parti. Patrick Lagacé parle de radio-poubelle à Québec et généralise sur la radio de la Capitale-Nationale. On dirait une forme d’incitation à détester en bloc la radio de Québec et ses auditeurs…

Je ne comprends pas pourquoi Monsieur Lagacé amène tout ça au niveau de la radio de Québec en général, je trouve que ça ne fait pas de sens. Je ne crois pas que l’émission de Bernatchez sur le FM Radio-Canada de Québec soit de la radio-poubelle. Je ne crois pas que CKRL fasse de la radio-poubelle. Même CHOI, depuis le départ de Jeff Fillion, ne fait pas de radio-poubelle.

De quoi parle-t-on ici si ce n’est de la guerre que ce livrent les médias. Les radios et journaux doivent, pour survivre face à Internet et aux sites comme le nôtre, y aller dans la surenchère, le scandale, et les psychodrames montés de toutes pièces. Et bien, c’est réussi, et tout ça sur le dos d’une chanteuse talentueuse partie trop top et qui n’est même plus là pour se défendre. D’ailleurs, de son vivant, même si je ne la connaissais pas personnellement, j’aurais été extrêmement étonné qu’elle participe à ce genre de faux événement. Je l’imagine rester en retrait de tout ce brouhaha avec un petit sourire moqueur et désabusé en coin. Une vieille âme se tenant loin du superflu et des batailles stériles. Ce qui n’est malheureusement pas notre cas ici dans le merveilleux monde médiatique.

C’est donc la folie depuis la gaffe de Louis Lacroix. On trouve même une page Facebook exigeant des excuses publiques sur la toile. En moins e 24h, plus de 6000 adhérents s’inscrivent et les insultes et propos haineux pleuvent (pas seulement sur cette page mais sur bien des blogues). Louis Lacroix s’excuse, ce qu’il devait faire, et dénonce les propos haineux à son égard, ce qu’il fait bien de dénoncer également :

7 janvier 2010

Ma réaction à votre réaction…
Lundi après-midi, j’ai émis une opinion maladroite sur le décès de Lhasa de Sela et la couverture médiatique qu’on lui accordait.
J’ai sans doute mésestimé sa notoriété et l’admiration que ses nombreux fans lui accordaient. Je tiens d’ailleurs à présenter mes excuses aux membres de sa famille, ses amis et ses fans que mes propos auraient pu choquer. Lhasa de Sela était une artiste respectée et reconnue internationalement et votre réaction à mes propos le prouve bien.
Je répète d’ailleurs que le décès d’une jeune femme de 37 ans, victime d’un terrible cancer du sein constitue une tragédie et est inacceptable dans notre société.
Je dois admettre que j’ai été ébranlé par les messages que vous m’avez envoyés et particulièrement choqué par la haine que certains d’entre vous avez exprimée. Je peux comprendre que vous n’ayez pas aimé mes propos, que vous ne les partagiez pas. Mais la méchanceté avec laquelle vous vous êtes exprimés dépasse l’entendement et à mon avis, l’outrage que j’ai pu commettre à l’égard de Mme de Sela.
Entre autres, la réaction de mes collègues journalistes qui sont tombés dans les attaques gratuites et personnelles sans même me connaître. Leurs propos les déshonorent. Je suis journaliste depuis 20 ans. J’ai couvert la politique au parlement de Québec, je suis allé en théâtre de guerre à plusieurs reprises, j’ai travaillé avec les meilleurs animateurs du Québec et j’ai bâti ma réputation avec acharnement. Je ne la laisserai pas détruire par ces individus qui tombent eux aussi dans le délit de l’ignorance, qu’ils me reprochent pourtant.
J’ai commis une erreur en mésestimant l’importance de cette artiste sur la scène internationale. Je vous présente mes excuses.
Louis Lacroix Source : http://www.fm93.com/gilles-parent_b_9_Form.html

Beaucoup se sont engagés dans ce conflit médiatique en prenant pour Louis Lacroix ou en se portant en défendeur de la mémoire de Lhasa De Sela comme si leur propre vie en dépendait. Et c’est là que les propos les plus violents, haineux, voire même menaçants se sont faits entendre. Vous n’avez qu’à lire les commentaires de différents blogues sur le sujet pour vous en convaincre. J’estime que ces haineux du Web déshonorent la mémoire de Lhasa De Sela davantage que s’ils avaient gardé le silence. Ils se sont engagés dans une joute entre Louis Lacroix et Patrick Lagacé, entre le gaffeur et le justicier, entre deux médias qui cherchent la cote d’écoute ou le trafic pour augmenter leurs revenus publicitaires autour d’un sujet vendeur. Lhasa De Sela, de par sa fin tragique, fascine les Québécois. Ça, Louis Lacroix, Patrick Lagacé et moi-même, qui écrit cet article, nous le savons. Concocter un psychodrame autour de cette tragédie fait tripler la cote d’écoute ou le lectorat en autant que vous en fassiez partie intégrante.

Lhasa De Sela était une chanteuse qui, dans ses chansons, décrivait la lumière et la noirceur du monde, le désespoir tout comme la sérénité, elle était une artiste habitée par cette dualité que ses chansons illustraient dans plusieurs langues. La LLorona (la pleureuse, titre de son premier album paru en 1997) mérite mieux comme départ.

Je trouve bien dommage que, malgré son million de disque vendus durant sa jeune carrière, elle fasse davantage parler d’elle au Québec depuis qu’elle est décédée que de son vivant. De plus, ce n’est même pas pour sa musique, mais pour sa maladie et pour ce crêpage de chignons entre Cyberpresse, FM 93,3 et une page Facebook où l’on retrouve des commentaires douteux.

Je vous propose d’aller au-delà de toutes ces fadaises et de découvrir sa musique via le site Internet de la chanteuse : http://lhasadesela.com/lhasa_de_sela/menu.php?lang=fr .

Je vous invite au silence, et si le cœur vous en dit, à avoir une pensée ou une prière pour elle en écoutant ou en découvrant sa musique. J’invite ceux qui l’aimaient à un deuil serein, à ceux qui ne la connaissait pas à un silence respectueux et aux autres qui la connaissaient mal, comme moi, redécouvrent ses chansons.

Peut-être que son œuvre lui survivra. Elle ne serait pas la première artiste à être plus populaire une fois passée de vie à trépas. Espérons qu’elle devienne encore plus connue pour la bonne raison : la pérennité de son œuvre.

Commentaires