Le niqab au Québec
Opinion du citadin
Le niqab, ce voile intégral porté par certaines femmes musulmanes, fait la manchette ces jours-ci. Une étudiante d’origine égyptienne qui fréquentait le CEGEP Saint-Laurent pour un cours de francisation a été expulsée de son cours parce qu’elle refusait d’enlever son niqab. L’étudiante a alors déposé une plainte à la Commission des droits de la personne. Le tollé se situe plutôt ici, les gens ayant peur que la Commission ne donne raison à la plaignante, ce qui rendrait alors la vie intenable dans un environnement académique.
Même Jean Charest a réagi, une fois n’est pas coutume, en affirmant que les services offerts au Québec « ça se fait à découvert ». Il faut dire aussi que les gens font une distinction entre le voile islamique (hijab) et la niqab, le voile intégrale qui ne laisse paraître que les yeux. Plus que ça, c’est la burqa ou les yeux sont cachés par une voile moustiquaire.
La Fédération des femmes du Québec (FFQ) se bat pour que l’on permettre le port du hijab aux employées de l’État qui le désirent mais pas le niqab. Pour la présidente de la FFQ interrogée par Radio-Canada « c'est un empêchement sérieux à la communication à beaucoup d'égards et ça empêche aussi les femmes d'être libres de leurs mouvements ».
De son côté, la Fédération nationale des enseignants (FNEEQ-CSN) demande l’adoption d’une Charte de la laïcité afin de mieux encadrer les accommodements raisonnables. Encore une fois, on demande de tout encadrer par des lois générales au Québec. Surtout ne pas laisser d’esprit d’initiative aux gens!
Les règlements internes du CEGEP Saint-Laurent sont bien suffisants. Les enseignants et la direction du CEGEP ont tout fait pour accommoder raisonnablement cette nouvelle arrivante. Cette dernière a fait montre d’un manque flagrant de coopération refusant d’être de son côté accommodante. Elle a été invitée à quitter l’institution d’enseignement. C’est son droit par la suite de porter plainte à la Commission des droits de la personne. Ceci dit, il serait très étonnant qu’elle ait gain de cause. Si tel devait être le cas, nous pourrions alors nous offusquer de la situation. Mais, pour l’instant, qu’y a-t-il de choquant dans cette histoire. L’étudiante qui refuse d’enlever son niqab en classe a perdu le droit d’aller à ses cours. Elle devra d’ailleurs se poser la question à savoir ce qu’elle est venue faire au Québec si c’est pour vivre ainsi en désaccord avec les valeurs de ses nouveaux concitoyens. Au Québec, on n’accepte pas que quelqu’un se cache le visage en société (on ne parle pas du foulard l’hiver quand il fait froid) ou dans la sphère publique.
Même pour l’avocat Julius Grey, spécialisé en droit de l’Immigration et en droit constitutionnel, le cas de cette étudiante en est un d’accommodement déraisonnable. En effet, le niqab, contrairement au turban, au kirpan ou à la kippa, porte atteinte au bon déroulement pédagogique surtout lorsque l’on doit évaluer la prononciation et qu’il faille observer les lèvres des élèves qui apprennent une nouvelle langue.
L’apparition du niqab choque aussi beaucoup de musulmans qui sont venus au Canada pour justement ne plus avoir à transiger avec l’intégrisme.
Le niqab au Québec ne semble pas prêt de s’implanter dans la sphère publique. Et c’est une très bonne nouvelle pour une société qui prône des valeurs comme l’égalité entre les hommes et les femmes et la laïcité dans la sphère publique. Faut-il légiférer pour autant? Je ne crois pas que ce soit nécessaire. Pour légiférer ne faudrait-il pas un problème autrement plus généralisé? Jusqu’à présent, force est de constater que dans toute cette affaire, le CEGEP Saint-Laurent a très bien agi et que, vraisemblablement l’affaire est close. Il n’y a pas de quoi fouetter un chat.
Reste à savoir pourquoi les instances fédérales et provinciales en matière d’immigration laissent entrer au Canada des individus aussi fermées et réfractaires aux valeurs de leur société d’accueil. Cela fait perdre du temps à tout le monde, l’immigrant tout comme les gens chargés de l’aider à s’intégrer. Si j’étais la Commission des droits de la personne, c’est sur cet aspect que je m’attarderais et non pas sur le niqab qui, au fond, n’est ici que le symbole d’une importante méprise provoqué par le Canada ou de la mauvaise foi de l’étudiante. Qui est fautif à ce moment là, l’immigrante ou les instances décisionnelles en matière d’immigration? Je n’ai en tout cas pas la réponse à cette question. Bonne chance à la Commission qui est vraiment sous la pression de l’opinion publique dans cette affaire.